Sur la crête, il y a une ancienne baraque qui servait de poste de guerre il y a trois ans aux groupes terroristes armés, j’appelle à la plus grande vigilance, l’équipe du génie va sortir pour voir s’il n’y a pas de mines”.
La voix du capitaine Eric, à la tête d’un détachement Barkhane engagé dans une opération tripartite dans la zone frontalière entre le Mali et le Niger fin mai, crépite dans la radio du convoi militaire qui progresse sous un soleil de plomb dans cette région majoritairement désertique.
Quelques minutes plus tard, deux soldats équipés de détecteurs de métaux, appuyés par un troisième militaire, descendent de leur véhicule hautement protégé pour sonder la zone. Fausse alerte, le convoi peut poursuivre sa progression.
Deux ans après la fin de l’opération Serval qui a permis de chasser en grande partie les groupes armés qui menaçaient la capitale Bamako, les affrontements directs se font rares et les engins explosifs improvisés – ouIED – déposés le long des routes sont devenus la menace principale pour les militaires déployés dans le nord du Mali.
Le 12 avril, trois soldats français ont été tués dans l’explosion d’une mine au passage de leur véhicule près de Tessalit. Au total, sept militaires de la force française ont trouvé la mort dans l’explosion d’engins explosifs improvisés depuis janvier 2013, soit près de la moitié des victimes.
“Sur ce genre de terrain, qui est sableux, mou, les IED ne se voient pas, ils les enterrent de plus en plus profond, mettent de charges de plus en plus grosses“, souligne un militaire.
“Ils nous observent tout le temps et ils s’adaptent très vite”, ajoute-t-il. “Ils mettent un IED à un endroit, s’il ne fonctionne pas, ils en posent un dix kilomètres plus loin d’une autre manière pour s’adapter à notre technique. A l’heure actuelle, on risque plus d’être touché par un IED que de se faire tirer dessus”.
CAMERAS ET BROUILLEURS
Tout au long des dizaines de kilomètres avalés chaque jour en opération, les militaires français et leurs alliés régionaux scrutent les abords des routes à la recherche d’éventuelles traces récentes de dépôt d’engins explosifs.
Pour contrer la menace, le détachement dispose – outre l’équipe du génie – de brouilleurs qui permettent de bloquer toute déclenchement d’IED commandé à distance.
La France a également sorti récemment de leur réserve et déployé sur place quatre véhicules hautement protégés Aravis. Utilisés lors des opérations en Afghanistan, théâtre également marqué par l’utilisation quasi quotidienne d’IED, ils sont dotés de plusieurs caméras qui permettent de déceler les anomalies sur les routes.
“Sur ces véhicules, vous avez une caisse qui est blindée qui fait qu’en cas d’attaque mine ou IED la structure, le châssis dessous va être détruit mais la cabine avec les personnes à l’intérieur va être protégée”, explique l’adjudant-chef Iouri.
Pour l’état-major de Barkhane, l’utilisation des engins explosifs par les groupes armés ne traduit pas une montée en puissance mais plutôt un “aveu de faiblesse”.
“L’ennemi a été sévèrement réduit mais conserve une sérieuse capacité de nuisance avec les IED”, reconnaît un officier au quartier général du dispositif à N’Djamena, au Tchad.
“Mais les modes d’actions qu’il emploie traduisent aussi sa faiblesse”, ajoute-t-il. “C’est un ennemi qui refuse tout affrontement direct, c’est un ennemi traqué”.
ENNEMI INVISIBLE
En l’absence d’affrontements directs, l’armée française se retrouve à poursuivre un ennemi invisible dans un territoire grand comme la France et dans un environnement géographique hostile, avec des températures pouvant dépasser les 55° qui mettent à rude épreuve hommes et matériel.
Les missions menées dans la région en appui des forces locales visent essentiellement à réaffirmer une présence dans des territoires qui servaient jusque là de sanctuaires aux groupes armés ou aux trafiquants, souligne-t-on au sein de Barkhane.
Au total, quelque 3.500 soldats français sont mobilisés dans cinq pays de la région (Mali, Burkina Faso, Tchad, Niger et Mauritanie). Et la France a annoncé en avril un renforcement de ses effectifs militaires en Côte d’Ivoire, potentiel réservoir dans lequel elle pourra puiser en cas de crise ou de besoin.
Selon le dernier bilan officiel fourni en juillet 2015 lors du premier anniversaire de Barkhane, le ministère de indiquait avoir mis “hors de combat” 125 “terroristes” et avoir saisi 20 tonnes de munitions, parmi lesquelles des engins explosifs et des mines.
(Edité par Yves Clarisse)
Marine Pennetier
Source: Capital
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