De son nom à l’état civil, Arouna Moussa Coulibaly, Ben Zabo, est né le 24 janvier 1979 à Tominian, dans la région de Ségou. N’étant pas issu d’une famille de musiciens, il y est arrivé par passion et fit ses débuts auprès du chef d’orchestre du «Bwa Band» de Tominian. Ensuite, il se perfectionna dans divers groupes musicaux de la place. Aujourd’hui, il a deux albums à son actif et un troisième est en préparation. Nous avons eu un entretien avec l’artiste qui nous explique les raisons de son choix : celui de faire la promotion de la musique Bô.
Le Reporter Mag : Pourquoi le surnom Ben Zabo ?
Arouna Moussa Coulibaly alias Ben Zabo : Je ne sais pas si je vous l’apprends, je suis né à Tominian, j’ai grandi dans ma grande famille maternelle. J’aime le dire souvent, car c’est une précision que je fais pour les gens qui demandent l’origine de mon nom, Ben Zabo. Mon père n’est pas Bô, il est un Bamanan de Ségou. C’est surtout ma mère qui est Bô de Tominian, elle est Diassana.
Le nom Ben, je l’ai eu de mon oncle maternel, le petit-frère de ma mère, depuis le jour de ma naissance à la maternité. Et tout le monde a commencé à m’appeler Ben. Pour montrer mon côté «métissé», ma grand-mère m’appelait Zabo. Ce qui fait Ben Zabo, pour signifier que je suis à la fois Bamanan et Bobo. Finalement, quand j’ai décidé de me lancer dans la carrière musicale, je me suis dit que le nom Arouna Moussa Coulibaly sur un Album n’est pas attrayant. Il faut un nom facile à retenir. J’ai donc décidé de prendre ce diminutif de Ben Zabo
Comment avez-vous appris la musique ?
Je dirai par amour et par passion. À Tominian, quand j’étais à l’école fondamentale, la seule famille qui détenait des matériels de musique était celle de feu François Goïta, chef d’orchestre de Bwa-Band de Tominian. Depuis notre enfance, nous avons vibré au rythme de cet orchestre et je ne manquais aucunement à ses répétitions. J’ai donc lié amitié avec les enfants de François, pour apprendre et m’approcher de leur feu père qui était finalement devenu mon maître.
Quand je suis arrivé à Bamako pour poursuivre mes études en Pharmacie, je n’ai pas abandonné la musique. Aussitôt, j’ai formé un premier groupe de jeunes étudiants Bwa. On a fait quelques prestations, mais malheureusement, on n’a pas pu réaliser un album. Le groupe s’est finalement disloqué. J’ai ensuite tenté de créer un deuxième groupe qui n’a pas non plus fonctionné. C’est ainsi que je suis allé au Conservatoire pour approfondir mes connaissances en musique.
Ben Zabo a combien d’albums aujourd’hui et qu’en est-il de ses tournées ?
Mon premier album est sorti en 2012. Intitulé «Wa Nii Bwa», j’en appelle à la solidarité des Bwa. La culture Bô est très méconnue des autres communautés tant sur le plan national qu’international. Depuis le décès de Dounakè Koïta, la musique Bô a pris un sérieux coup dans son élan. Les quelques morceaux interprétés pas d’autres ethnies manquaient sérieusement d’authenticité.
Pour parer à cette situation, il fallait que nous, jeunes Bwa, songions à faire de la musique. Le titre «Wa Nii Bwa» est une façon de signer notre retour sur la scène musicale. Et pour ce premier album, j’ai eu la chance de tomber sur un Label, une Maison de production allemande, Glitterbeat, qui m’a propulsé au-devant de la scène. Avec cet album, j’ai pu jouer à tous les Festivals au Mali et dans la sous-région (Bénin, Côte d’Ivoire, Burkina Faso).
J’ai aussi joué devant plus de 60.000 personnes en été dernier lors d’une tournée en Europe, où j’ai fait une dizaine de pays pour des Festivals. Cela veut dire que ce premier album m’a déjà amené loin, très loin. Le deuxième album est sorti en fin 2015. Avec la crise multidimensionnelle qu’a connue notre pays en 2012, nous l’avons baptisé «Wa Maliba» (Notre grand Mali). À travers cet album, je lance un important appel : Les Maliens et les amis du Mali doivent œuvrer pour sortir notre pays de cette grave crise qui n’a que trop duré.
Quels sont les projets de Ben Zabo après de telles tournées à travers le monde ?
On est en ce moment à Bamako en pleine préparation du troisième album pour le mois d’août 2016. On devrait aller en tournée, mais nous avons jugé nécessaire de finir cet album avant d’entamer une quelconque tournée.
Vous êtes Bamanan, vous faites la fierté du Bô. Qu’est-ce qui explique cela ?
La musique est universelle. Ce n’est pas parce qu’aujourd’hui je chante en Bomu que c’est exclusif. Demain, je pourrais bien chanter dans une autre langue différente du Bomu. Les circonstances pourraient bien m’y amener et cela figure d’ailleurs dans mes projets. Pour le moment, j’ai choisi comme mission de défendre la culture Bô avec la langue, les instruments et les accoutrements Bwa.
Quel message avez-vous à l’endroit des Bwa en particulier, et du peuple malien en général ?
Je pense que chacun doit comprendre que nous sommes tous concernés par la crise actuelle que traverse notre pays. Avant, on croyait que cela n’arrivait qu’aux autres, jusqu’au jour où on s’est rendu compte que c’était notre tour. Nous avons pu constater avec la multiplication des attaques terroristes et la recrudescence de la violence et de l’insécurité que les pays qui se disent très sécurisés et technologiquement sophistiqués, ne sont pas épargnés. Pour moi, il faut que chacun d’entre nous soit vigilant. J’invite tous les Maliens en général, et tous les Bwa en particulier, à se donner la main afin que la paix et la réconciliation nationale soient une réalité dans notre pays, à travers l’accord issu du processus d’Alger.
Propos recueillis par Gabriel TIENOU
Source: Le Reporter
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