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Le ministre Bathily face aux députés : Une question d’actualité à l’allure d’un règlement de comptes

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Faire le point sur  la mise en œuvre des recommandations issues des Etats généraux sur le foncier, tel était le principal sujet des questions d’actualité auxquelles le ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires Foncières, Mohamed Aly Bathily   devait se soumettre pour apporter des éléments de réponses aux préoccupations des députés lors de la séance plénière du mardi 24 Mai 2016.

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Parmi les points inscrits à l’ordre du jour, la rubrique questions d’actualité occupait une place de choix avec deux sujets d’importance capitale. Le premier thème portait sur le foncier et le deuxième était relatif au déroulement de l’année scolaire et les préparatifs des examens scolaires et universitaires. Le banc du gouvernement était occupé par  les  ministres chargés de l’éducation et de l’enseignement supérieur ainsi que le ministre  des Domaines de l’Etat et des Affaires Foncières, assistés par Mme Diarra Raky Talla, ministre chargée des relations avec les institutions de la République. Comme il faillait s’y attendre,  le foncier fut le centre d’intérêt des députés.

Mais malheureusement au lieu d’assister à un  exercice démocratique pour édifier les citoyens sur un sujet aussi sensible que le foncier, nous avons plutôt assisté à un règlement de comptes entre certains députés de la majorité  présidentielle et le ministre Bathily.  Pourquoi autant de haine envers le ministre? Bathily serait-il devenu  encombrant pour la majorité présidentielle? Les députés sont-ils impliqués dans les scandales fonciers? Pourquoi défendre bec et ongle la cause des spéculateurs fonciers au détriment des citoyens qu’ils sont censés  représenter à l’Assemblée nationale? Voici autant de questions qui taraudent l’esprit des Maliens après la réaction des députés face au Ministre Bathily. Une réaction contraire à leur mission de défense des intérêts du peuple. C’est du moins le constat fait ce mardi 24 mai 2016 à l’Assemblée nationale.

Les griefs des députés et la suspension de la séance

Le maintient de la mesure de suspension, la gestion et le financement du cadastre, l’annulation des titres fonciers à Kati et à Bamako, les propos de Bathily que certains députés qualifient d’incitation à la violence lors des meetings d’une association à laquelle le ministre serait militant, la démolition des maisons à Souleymanebougou, etc. Voilà, entre autres, les préoccupations exprimées par les députés, toutes tendances confondues.

Dès l’ouverture de la séance par le président de l’institution parlementaire, le ton fut donné par une attaque frontale d’un député du RPM contre le ministre. Dans son intervention, le député indique que les militants de l’association APM de Bathily ont été jetés en prison pour entrave à l’autorité de l’Etat. Selon lui, c’est le ministre Bathily qui leur aurait dit d’organiser un meeting à Dioïla pour réclamer leurs droits. Suite à cette question, le président de l’Assemblée nationale a interrompu le député au motif que ce point ne figure pas à l’ordre du jour. Ce qui n’a pas été du goût du président du groupe parlementaire RPM, Moussa Timbiné.

Ce qu’il a fait savoir au président de l’Assemblée nationale de manière inacceptable, selon ce dernier.

En réaction, le Président a suspendu la séance  pour une concertation de 15 minutes avec les présidents des différents groupes parlementaires. 30 minutes après, les travaux ont repris avec une mise au point du président Issaka Sidibé : «Cette pratique est  un  exercice démocratique et non un règlement de comptes personnel». Dans cette logique, Moussa Timbiné intervint pour calmer le jeu en retirant la question ayant suscité la polémique et invita les uns et les autres  à formuler leurs questions conformément à l’ordre du jour. Malgré cette mise au point, les intervenants, hormis ceux du Sadi et du groupe parlementaire Adema/Asma, ont continué d’exprimer leur désaccord  avec la façon de faire du ministre Bathily. Si Mamadou Diarrasouba du RPM pense que le ministre manque de méthode et de pédagogie dans  son combat contre la spéculation foncière, Moussa Timbine enfonce le clou en ces termes «la problématique foncière est une priorité du président de la République. Dans ce combat personne n’est mieux placé que nous.» Même son de cloche au groupe parlementaire APM avec le député Zounama N’tji Doumbia  et deux députés de l’opposition, Mody N’diaye et Alkaïdi Mamoudou Touré. Pour les uns et les autres, les agitations de Bathily   lors des meetings en invitant les paysans à défendre leurs terres ne riment pas avec  son statut de ministre de la République. D’où cette question de Alkaïdi Mamoudou Touré «un ministre doit-il inciter au trouble à l’ordre public quelle que soient ses raisons et la pertinence des idées ?»

La riposte de Bathily et ses soutiens

Malheureusement pour ces députés, la réplique ne  s’est pas faite attendre. Avant la réponse du ministre, le président du parti Sadi, Dr.Oumar Mariko n’est pas passé par quatre chemins, avec un accent particulier, sur la souffrance des paysans dans les  différentes localités du pays. «De Niono à Sanamandougou en passant par Saou, Baraoueli, Fana, Dioro Yélimané Toubamakan, Tienfala, Bamako et environnants, c’est la souffrance de tous les jours avec des arrestations, séquestrations, les humiliations et autres piétinements du droit coutumier par des magistrats, des commerçants et des officiers supérieurs. Le titre foncier actuellement n’est rien d’autre que la légalisation de la spéculation foncière et crée l’insécurité permanente pour les usagers légitimes et légaux. Le droit seul ne peut résoudre la question, il faut l’engagement politique.» a-t-il déclaré.  Comme pour dire aux détracteurs du ministre et autres spéculateurs fonciers  de faire attention et que rien ne peut arrêter la machine de Bathily contre les pyromanes fonciers.

En réponse aux préoccupations des députés, le Ministre Bathily a surpris l’auditoire avec une dose de sagesse et de respect dans ses propos. Avant de faire le point sur la mise en œuvre des recommandations des Etats-généraux sur le foncier, le ministre a été on ne peut plus clair : «Je suis là pour répondre aux questions ayant trait à la mise en œuvre des recommandations des Etats-généraux sur le foncier. Je répondrai  en ma qualité du ministre de la République qui me vaut d’être ici. Cela ne signifie pas que je n’accorde pas d’importance aux autres propos qui m’ont été adressés à titre personnel, se référant à des propos et des actes que j’ai tenus dans  un autre cadre plutôt que celui du gouvernement», a-t-il tenu à recadrer. Partant, il a fait le point sur la mise en œuvre des recommandations des Etats-généraux sur le foncier, tenu en 2009. Selon Me Bathily, la mise en œuvre des recommandations doit être adossée  à un certain nombre de facteurs. Il s’agit notamment  du financement, du cadre juridique et administratif. Malgré les difficultés, le département dispose d’un chronogramme avec une commission de suivi et un décret en date du 25 mars 2016 fixant le cadre institutionnel de pilotage des réformes domaniales et foncières au Mali. Le gouvernement a aussi mis en place une structure de réforme après l’adoption de ce décret. « Nous avons procédé à la relecture du code domanial et foncier, une grande partie de cette relecture a été faite par mon département et doit être soumise aux autres départements qui concourent autant que mon ministère à la mise en œuvre des recommandations.», a informé le ministre. La gestion du cadastre est un véritable défi pour l’Etat, reconnait-il. « Un cadastre ne se crée pas par ce qu’on le veut. Mais on crée un cadastre parce qu’on a les moyens. Dans l’histoire, c’est la première fois que notre pays affecte, en 2016, un milliard à ce volet sur 33 milliards dont le cadastre a besoin pour être créé », poursuit-il. Dans le même  registre, le gouvernement a  deux projets de décret  à la primature : l’un pour la création de la direction des domaines et l’autre pour une direction générale des cadastres.

Toutefois, il a estimé qu’il ne s’agit pas  de précipiter  les choses mais plutôt de faire avec une méthode efficace pour répondre rationnellement aux préoccupations de la problématique du foncier.

Selon le ministre, de la tenue des Etats-généraux en 2009 jusqu’en 2016, le Mali a connu trois présidents de la République avec à la clé des changements de gouvernement. Ce qui a pour corolaire l’entrave du travail de l’administration. Malgré cet état de fait, avec l’arrivée d’IBK, le gouvernement a engagé certaines actions  comme la numérisation des titres fonciers depuis janvier, l’équipement et la formation des services techniques pour la localisation et la délimitation  des espaces.

Abordant la question de la prorogation de la suspension, il dira qu’elle s’explique par le souci d’éviter les conflits, surtout à l’approche des élections communales. Donc, aucun maire ne peut attribuer une parcelle sans l’autorisation de l’Etat.

Pour terminer, Bathily a laissé entendre qu’en tant que ministre de la République, qu’il ne peut pas violer la loi comme certains aiment le faire. Donc il s’inscrit dans le respect du droit  puisque, selon lui, la violation du droit est source d’insécurité.

Nouhoum DICKO

Source : Le Prétoire

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